PAROLES D’UN HOMME LIBRE
Les propos d'un homme brillant et grand patriote...
YVES MICHAUD
VLB Éditeur, Montréal, 2000.
EXTRAITS (2/4)
Pages 24 - 33
La première partie : https://grandslabours.blogspot.com/2020/06/paroles-dun-homme-libre.html
LE CONGRÈS DU « MIROIR »
Après m’être accordé un moment de réflexion à la suite du congrès
du Parti Québécois en 1996, après être allé au fond des choses et avoir analysé
sereinement le discours de clôture du président, j’en arrive à la conclusion que ce
n’est pas le parti qui doit changer mais M. Bouchard lui-même, dans la forme et
le fond de ses relations personnelles avec les militants qui l’ont couronné
chef, il y a à peine un an.
J’ai voté la confiance au président du parti lors
du congrès, nonobstant nos divergences sur la cadence des réformes urgentes de
la loi 101 et de la loi 86. J’ai vote la confiance parce que je crois encore
que le temps venu, M. Bouchard peut amener une majorité de Québécois à voter en
faveur de la prise en main de leurs affaires, ce qui s’appelle tout bonnement
la souveraineté.
Mais M. Bouchard, si charismatique, si
messianique soit-il, ne pourra pas faire cela tout seul. Un excellent cavalier
sans monture ne va pas très loin, et comme dit la chanson, la marche à pied, ça risque
d’user les chaussures énormément. La monture de M. Bouchard, c’est le Parti
Québécois, un pur-sang rétif, fringant, nerveux, difficile à monter, réfractaire
au fouet, mais capable de remporter toutes les courses à obstacles s’il se sent aimé
et apprécié de son maître.
Le Parti Québécois, c’est des dizaines de
milliers de militants qui font à
longueur d’année du porte à porte dans les rues sales
et transversales de Montréal, dans les villes et les villages du Québec, qui
entretiennent la flamme, alimentent l’espoir, en plus de servir de pompes à fric lors des
campagnes de financement.
On ne changera pas la nature profonde du PQ. Il
est né comme ça, avec son pedigree, son code génétique, sa culture, sa
tradition et son histoire. Profondément enraciné dans les masses populaires
dont il se fait l’écho, rouspéteur, parfois revendicateur jusqu’à l’agacement,
il n’en est pas moins un formidable cheval de course, toujours prêt à répondre à l’appel du clairon
et à prendre
rapidement la première position sur la piste, mais il ne marchera jamais à la trique et au fouet.
Lui aussi, comme son maître, a besoin d’amour; il a besoin qu’on lui caresse
quelquefois le col avec affection, de sorte qu’il ne se sente pas uniquement
une bête de somme ou un cheval de trait corvéable à merci, utilisé sans
ménagement à tous les labours ingrats.
M. Bouchard aurait intérêt à s’ajuster à sa
monture. Il doit comprendre qu’une aussi belle bête, d’aussi belle race, risque
parfois de ruer dans les brancards, d’être réfractaire à des appels à la discipline
qui sentent le roussi de nos anciens collèges où des pères fouettards étaient
commis à la surveillance des élèves turbulents.
J’ai peine à le dire, mais j’ai éprouvé
un certain malaise en écoutant le discours de clôture de M. Bouchard à la fin du congrès
de 1996. Les propos qu’il a tenus n’étaient ni rassembleurs ni propices à renforcer l’unité
du parti. Le PQ n’a jamais été
et ne sera jamais, contrairement aux autres partis
politiques, un cénacle d’adoration mutuelle. Il faut faire et vivre avec. S’il
devait changer, ce serait pour se renier, rendant ainsi le débat démocratique
futile et sans substance. Ce n’est sûrement pas le but poursuivi par le premier
ministre. S’il veut aller loin, ce que nous souhaitons avec lui, il devra
ménager un peu plus sa monture.
NOTE :
On arrive maintenant à l’énoncé de quelques évidences que la rectitude politique imbécile interdisait à M. Michaud… La bêtise teinté de lâcheté qui l’a fait condamner sans l’entendre, au mépris de la justice et de l’honnêteté les plus élémentaires.
La république de Côte Saint-Luc !
Une initiative de ce genre a avorté dans les
villes de Beaconsfied et Hampstead au grand désappointement de l’éditorialiste
de l’hebdomadaire Suburban qui accuse les édiles de ces deux villes de
ne pas se tenir debout. Ces dernières, respectant la loi des cités et villes du
Québec, ont jugé que pareille question n’était pas de leur ressort, les
référendums à l’échelle municipale ne devant porter que sur des sujets locaux, par
exemple un règlement d’emprunt pour des travaux d’aqueduc, un changement de
zonage, les permis pour de nouveaux commerces, etc.
On ne craint pas les contradictions dans l’ouest
de l’île de Montréal, c’est le moins que l’on puisse dire. Le Suburban coiffe
son soutien à cette initiative folichonne du joli titre de: «Le pouvoir du peuple
triomphera »!
Alors qu’on nous rebat les oreilles depuis des
années sur la fameuse primauté du droit et le respect de la constitution
canadienne, les activistes du West Island fondent leur argumentation à l’échelle
municipale sur la préséance du pouvoir du peuple sur les lois existantes. Or
c’est précisément ce que plaide le gouvernement du Québec en ne reconnaissant
pas à la Cour Suprême du Canada le pouvoir de décider de l’avenir du peuple
québécois.
Le journal crie au scandale sur l’éventuelle
perte du statut de ville bilingue de Rosemère, conformément à la loi, parce que la
population anglo-québécoise a glissé sous la barre des 50%. En somme, la
majorité de langue française est rigoureusement tenue de respecter les lois,
tandis que la minorité anglo-québécoise, en sa qualité de « société
distincte »»,
peut en toute impunité les transgresser et se comporter
comme si elles n’existent pas. Ce genre d’attitude est sans doute une version
corrigée et améliorée du fameux fair-play britannique.
Là où le journal dépasse les bornes, c’est lorsque qu’il demande à la minorité juive,
majoritaire dans Côte Saint-Luc, « de s’impliquer comme telle dans le débat, elle qui a toujours été en première ligne de
la défense du droit des minorités » (sic)! En termes clairs, cela s’appelle une incitation au racisme ethnique et
religieux. Les citoyens de cette municipalité ont tous les droits de participer
au débat à ce titre, mais non en fonction de leurs affinités ethniques ou
religieuses. On a vilipendé Jacques Parizeau parce qu’il avait fait le soir des
résultats du référendum le constat, sans
commentaire, que la défaite était attribuable à l’argent et à des
votes ethniques. Et voilà que l’on exhorte les citoyens de confession juive
d’une municipalité du Québec de s’impliquer dans une question politique du fait
de leur appartenance religieuse. Dangereux! Dangereux! Dangereux!
La chasse aux sorcières
Pour revenir au chanoine Lionel Groulx, ses
détracteurs se gardent bien de citer les propos de ce dernier invitant les
Québécois « à posséder comme les Juifs leur âpre volonté de survivance, leur
invincible esprit de solidarité, leur impérissable armature morale ». L’historien donnait alors l’exemple du peuple juif comme modèle à
suivre pour que les Québécois affirment leur propre identité nationale et
assument pleinement l’héritage de leur histoire, ajoutant que « l’antisémitisme
était une attitude antichrétienne et que les chrétiens sont en un sens
spirituellement des sémites». Avouez que comme
propos antisémites, l’on pourrait facilement trouver mieux!
Il y a dans cette cabale du B’Brith, qui heureusement n’est pas
représentative de la totalité de nos concitoyens de religion juive, des relents
de haine, des ferments d’intolérance, des graines de discorde et de division
semées à tous vents contre le peuple québécois et les valeurs qu’il attache à son passé et à ses racines. Cette
sorte de terrorisme intellectuel vise à nous culpabiliser d’être ce que nous
sommes, à nous faire nous sentir honteux de parler la langue que nous parlons et à laisser entendre
aux quelque deux millions et plus de Québécois qui souhaitent devenir maîtres
chez eux qu’ils commettent un «
crime contre l’histoire de l’humanité », reprenant ainsi
les paroles insensées d’un ancien premier ministre du Canada.
Il est temps que ce genre de chasse aux sorcières cesse, et le plus tôt sera le mieux. On
botte les fesses du peuple québécois depuis deux siècles et demi. Ce n’est pas
tellement long en comparaison de deux millénaires d’errance du peuple juif,
mais cela fait mal tout de même...
Le vote ethnique
notamment, la réaction de Jacques Parizeau le
soir du référendum, au sujet de l’argent et des votes ethniques, et
ultérieurement cette sorte d’activisme qui voisine parfois l’hystérie
collective dans des coins du Québec à forte majorité autre que de langue française.
Dans la municipalité de Côte Saint-Luc, encore
elle! où les membres du conseil municipal ont adopté une résolution visant à tenir un référendum
local dans l’éventualité d’un «
oui» majoritaire à un scrutin sur la souveraineté,
douze bureaux de votation n’ont enregistré aucun « oui » au scrutin
populaire de 1995.
Section de vote 4 Oui: 0 Non: 212
Section de vote 25 Oui: 0 Non: 163
Section de vote 30 Oui: 0 Non: 193
Section de vote 31 Oui: 0 Non: 173
Section de vote 32 Oui: 0 Non: 203
Section de vote 39 Oui: 0 Non: 146
Section de vote 56 Oui: 0 Non: 189
Section de vote 58 Oui: 0 Non: 239
Section de vote 65 Oui: 0 Non: 172
Section de vote 66 Oui: 0 Non: 188
Section de vote 83 Oui: 0 Non: 183
Section de vote 38 Oui: 0 Non: 214
Section de vote 25 Oui: 0 Non: 163
Section de vote 30 Oui: 0 Non: 193
Section de vote 31 Oui: 0 Non: 173
Section de vote 32 Oui: 0 Non: 203
Section de vote 39 Oui: 0 Non: 146
Section de vote 56 Oui: 0 Non: 189
Section de vote 58 Oui: 0 Non: 239
Section de vote 65 Oui: 0 Non: 172
Section de vote 66 Oui: 0 Non: 188
Section de vote 83 Oui: 0 Non: 183
Section de vote 38 Oui: 0 Non: 214
TOTAL
Oui: 0 Non: 2275
Dans certains bureaux des villes de Hampstead, de
Montréal Ouest, de Dollard-des-Ormeaux, c’est du pareil au même avec des
sections de vote de plus de deux cents électeurs où il n’y pas un seul vote
en faveur du oui!
Certes, chacun est libre de voter comme il
l’entend, mais il me semble que la démocratie doit reposer sur un certain
équilibre des forces et des opinions qui sous-tendent le débat public. Les
circonscriptions québécoises de majorité de langue française ont manifesté cet
équilibre en votant à 60 % pour le « oui » et 40% pour le « non »». On ne peut pas dire devant ces résultats, à moins d’être d’une absolue
mauvaise foi, qu’il y eut un vote ethnique chez les Québécois dits de
« souche ».
Alors que c’est à l’évidence le contraire
dans certaines communautés autres que de langue française. Qu’il n’y ait pas un
seul vote favorable au «
oui »
dans 12 bureaux de votation sur un total de 2275
votants, on peut raisonnablement constater qu’il y eut un vote ethnique contre
la souveraineté. Ce n’est pas le plus bel exemple d’exercice démocratique à citer. Le
constater, le dire, voire le regretter, n’est pas une infamie quoiqu’en pensent
et quoiqu’en disent les zélotes du discours « politiquement
correct »».
Une telle unanimité ne me paraît pas saine et n’est guère
susceptible de favoriser une meilleure
entente entre des citoyens qui devront bien apprendre à vivre ensemble avec leurs
divergences et leurs confrontations mais sans haine et sans rejet de l’autre. À
cet égard, le référendum de 1995 fut loin d’être exemplaire.
* * *
Numérisé par Jean-Luc DION
30 juillet 2002
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