POURQUOI DES ÉOLIENNES
GIGANTESQUES À TROIS PALES ?
Pr Jean-Luc Dion, ing. (retraité)
27 novembre 2024 – 3 janvier 2025
Comme on peut le voir dans la figure 1, les turbines éoliennes installées ont des dimensions surprenantes qu’on ne cesse de vouloir augmenter. Bien sûr, c’est pour produire plus de puissance. Mais, pourquoi encore, considérant leur grande inefficacité apparente, vu que la plus grande partie du vent traverse le rotor sans agir sur les pales ? C’est ce qui est discuté ici.
Figure 1 – Les dimensions de turbines éoliennes en fonction.
La réponse est finalement relativement simple. Considérons la turbine de rayon R de la figure 2 qui balaie la surface S à travers laquelle souffle un vent uniforme de vitesse v. On sait que la puissance du vent incident sur la turbine est donnée par cette simple expression où d est la densité de l’air, 1,2 kg/m3 [[1]] :
Pv = (1/2)d S v3 (watts, W) (1)
On sait que la puissance mécanique que peut donner la turbine est une fraction G de la puissance maximale théorique déterminée par le nombre de pales et la limite de Betz, 16/27, imposée par la mécanique des fluides :
Pm = (16/27) (1/2)d S v3 = 0,296 d S v3 = 0,355 S v3 (W) (2)
D’après la théorie, cette puissance ne peut être approchée que si le nombre de pales est très grand, ce qui est mécaniquement impossible avec cette technique de montage, vu le poids énorme des pales. Le secteur en vert de 12o dans la figure 2 représente pour les trois pales 10% de la surface du rotor et s’apparente à la surface d’action du vent sur les pales qui est apparemment encore inférieure.
Ainsi, la puissance effective produite par la turbine est :
Pe = 0,355 G S v3 (W) (3)
où la valeur de la fraction G doit nécessairement se rapprocher du rapport de la surface totale des pales Sp3, une surface « d’action », à la surface S = S3 dans le cas présent :
G3 ~ Sp3/S3. (4)
Figure 2 Figure 3
Dans le cas illustré, G3 = 0,1.
Or, si on veut doubler le nombre de pales, il faut nécessairement qu’elles soient plus étroites et plus courtes du point de vue de la résistance mécanique. En supposant une longueur R/2, la surface du rotor est alors S/4. En conservant les proportions, la surface totale Sp6 des six pales sera donc la moitié de celle des trois pales de la figure 2 : Sp6 = Sp3/2. Comme la surface du rotor il s’ensuit que la puissance produite pour la même vitesse de vent v est la fraction 1/2 de celle de la figure 2.
Appliquons le même raisonnement au cas d’une turbine à 9 pales de rayon R/3 (figure 4). La surface du rotor est alors S/9. S’il n’y avait que trois pales, leur surface Sp9 serait la fraction 1/9 de celles de la figure 1. Comme il y en a trois fois plus, Sp6 = Sp3/3. Comme il y a trois fois plus de pales : G9 = 3 Gp3. La surface balayée étant le neuvième de S, la puissance produite par l’éolienne à six pales sera donc la fraction 1/3 de celle à trois pales pour la même vitesse de vent.
Exemples numériques Supposons une vitesse de vent de
référence de 1. Turbine à trois pales avec R = 90 m S = 25 450 m2 La puissance du vent : Pv3 = Pm = (1/2)d S v3 = 20,95 kW La puissance idéale fournie par la turbine : Pm3 = 0,355 x 25 450 x 1372 = 12,40 MW La puissance effective probable : Pe3 = G3 x Pm3 = 1,240 MW ( ~ 5,9% Pv3 ) 2.
Turbine à 6 pales avec La puissance idéale : Pm6 = 0,355 x 6362 x 1372 = 3,099 MW Pe6 = G6 x Pm6 = 0,6197 MW |
Figure 4 |
3.
Turbine à 9 pales avec
R = 30 m. S = 2827 m2
Puissance du vent : Pv9 = Pv3/9 = 2,328 kW
La puissance idéale :
Pm9 = 0,355 x 2827 x 1372 = 1,377 MW
Pe9 = G9 x Pm9 = 0,4131 MW
CONCLUSION
En comparant les puissances produites par des turbines éoliennes de divers diamètres, il est possible de conclure qu’on les fait de plus en plus grandes afin d’en tirer une puissance significative car la plus grande partie du vent traverse les rotors sans agir sur les pales. Il faudrait pratiquement 4 petites turbines à 9 pales pour remplacer une grande à 3 pales ayant 3 fois leur diamètre…
Considérant la *limite de Betz* qui impose un maximum théorique de 59% à la conversion de la puissance du vent en puissance mécanique par une turbine éolienne, et le coefficient G relativement élevé de 10% défini dans cette étude, le rendement effectif d’une éolienne courante ne devrait guère dépasser 6% de la puissance du vent traversant le rotor. Ainsi, dans l’exemple numérique 1, une éolienne de 90 m de rayon, avec un vent de 40 km/h d’une puissance de 21,0 MW (12,4/0,59), la puissance électrique obtenue de la turbine ne pourrait être que 1,24 MW, vu que le rendement des génératrices électriques est près de 95%. C’est donc la raison de leur gigantisme.
Et, dans tous les cas, il faut considérer les coûts de fabrication de tout le matériel requis, la perte de territoire, le plus souvent agricole, les coûts d’aménagement de celui-ci, le raccordement au réseau électrique, et ceux de transport, les frais d’entretien et ceux de remplacement de l’équipement, etc. En bout de ligne, l’énergie électrique produite est de l’ordre 1,2 MW, soit 5,7% de l’énergie initiale du vent…
Maintenant, si on se sert de l’énergie électrique produite par cette dernière éolienne à trois pales pour produire de l’hydrogène par électrolyse, on estime le rendement de la chaine *source électrique – hydrogène – charge électrique* à environ 25%. Dans ce dernier cas, 1,4% de la puissance du vent donne une énergie électrique utile [[2]].
Voir : https://grandslabours.blogspot.com/2024/03/un-nouveau-type-deolienne.html
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