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lundi 1 août 2011

LA VRAIE FOLIE...



C'est un grand éditeur étatsunien qui le dit...


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La vraie folie

John R. MacArthur - éditeur de Harper's Magazine.
LE DEVOIR  -  1 août 2011

Confronté par les fous furieux de la droite américaine dans le «débat» sur la hausse du plafond de la dette et le possible effondrement du crédit national, Barack Obama se trouve en assez bonne posture. Pour l'instant, le président tient le rôle de l'adulte stable face à la conduite enfantine et têtue des radicaux anti-taxe du Tea Party et des sursauts tactiques du président de la Chambre des représentants, John Boehner.

Cependant, le scénario d'un Obama raisonnable assiégé par des imbéciles républicains est bien trop simpliste, puisqu'une des sorties évidentes de la crise — une réduction draconienne des dépenses militaires coordonnée à un retrait total des troupes de l'Afghanistan et l'Irak — ne fait aucunement partie du débat politique en cours à la Maison-Blanche, au Congrès ou dans les médias. Conseillé par ses propres fous (notamment son nouveau directeur de la CIA, le général David Petraeus, et la secrétaire d'État Hillary Clinton), Obama joue également le rôle d'un chef de guerre acharné décidé à aller jusqu'au bout, même si sa stratégie s'avère autodestructrice.

Alors que les deux partis politiques s'affrontent autour du «droit» à l'assistance publique et de l'imposition des riches, les coffres du Trésor continuent à se vider en raison de la poursuite de trois guerres qui ne peuvent être gagnées et dont on ne voit pas la fin. Pendant ce temps, les preuves de la futilité des engagements en Afghanistan, en Irak et en Libye s'accumulent.


La plus récente de ces preuves a été révélée dans Le Monde par l'ancien ambassadeur britannique à Kaboul, Sir Sherard Cowper-Coles.
Ultraprudent dans ses écrits et constats, diplomate jusqu'au bout des ongles, Cowper-Coles a néanmoins confié au journal que la guerre en Afghanistan « va accentuer le déclin relatif des États-Unis, notamment aux yeux des populations musulmanes ». D'après cet ami déclaré de l'Amérique, «l'effet sera similaire à celui produit sur l'image de la France et de la Grande-Bretagne après leur intervention militaire avortée à Suez en 1956».

Cowper-Coles est tout aussi franc concernant le général Petraeus — supposé être, avec ses tactiques de «
surge », l'architecte de «la paix» en Irak et de la «victoire» prévisible en Afghanistan —, qui a grimpé aux plus hauts niveaux dans l'administration démocrate et qui a une forte influence sur Obama. «Selon moi, le général Petraeus incarne l'erreur stratégique commise dans ce pays [l'Afghanistan] depuis des années. Qu'y a-t-il de nouveau depuis qu'il est aux commandes? Une augmentation du niveau de violence et un formidable accroissement du nombre d'opérations des forces spéciales pour tuer des talibans. Il affaiblit les chances de sortie politique en tuant des commandants talibans avec qui on devrait parler. On ne fait que retarder la résolution du problème.»

Et l'Irak? Un «problème» résolu par le génie de Petraeus et Obama? En principe, Obama a promis de retirer toutes les troupes américaines à la fin de 2011. Mais le New York Times du 14 juillet raconte que le premier ministre Nuri Kamal al-Maliki «dit en privé aux fonctionnaires américains qu'il veut que leur armée reste après cette année».


Certains Américains (surtout les faucons libéraux de la faction Clinton et les légionnaires du néo-empire romain comme Petraeus) voudraient bien rester, sauf que la rivalité entre insurgés chiites et insurgés sunnites, tous deux ciblant les soldats de l'occupant, complique beaucoup la situation. Il semblerait que Maliki, qui fait partie de la majorité chiite, est plus clément envers ses camarades religieux qui soulèvent des objections à la présence américaine qu'il ne l'est envers ses rivaux des factions antiaméricaines sunnites.


Le fait que, selon le Times, «le même gouvernement irakien qui veut garder les Américains tolère tacitement les attaques par les milices chiites contre les troupes américaines» suggère peut-être que le projet obamanien souffre d'un déficit de réalisme. Néanmoins, on peut facilement prédire que l'armée américaine restera en Mésopotamie au-delà du 30 décembre et que les dollars, ainsi que le sang américain, vont continuer à couler à flots.


À propos de la Libye, on ne voit pas non plus la sortie ou la chute du régime. Kadhafi a l'air de tenir bon et les alliés occidentaux ne trouveront pas de réconfort dans
les fantaisies triomphalistes de Bernard-Henri Lévy. Ni la «philosophie», ni l'«ingérence humanitaire» ne vont régler les conflits antiques des tribus arabes. Déjà les frais de ce dernier rêve romantique de BHL dépasse 1 milliard de dollars pour Washington. On dira que ce n'est pas grand-chose au regard des mille milliards de dollars (au moins) dépensés en Irak et des 450 milliards en Afghanistan... mais quand même.

Il est vrai qu'Obama vient d'annoncer le retrait progressif de 33 000 soldats d'Afghanistan à la fin de 2012, mais 68 000 resteront sur place, à peu près le double du nombre de ceux qu'il a hérités de George W. Bush. Soustraire ce qu'il a ajouté il y a deux ans, c'est seulement battre les cartes. La majorité démocrate au Sénat a beau dire que la diminution des forces militaires outre-mer au cours des prochaines années va entraîner d'énormes économies, mais c'est un leurre.


La question qui se pose donc est de savoir pourquoi un président censé être sain d'esprit risquerait la santé fiscale de son pays pour la poursuite d'une folie guerrière à l'étranger. Pour comprendre cela, il faut comprendre la logique politique de Barack Obama, qui s'est toujours adapté aux désirs du pouvoir établi et qui cherche à se protéger contre les accusations de faiblesse, de sentiments pro-islam et de pacifisme caché. Mieux vaut mener campagne pour la réélection en tant que commandant en chef farouche et grandiose — tueur d'Oussama Ben Laden et des talibans — que parier sur la paix et l'équilibre économique des États-Unis. C'est fou, non?


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John R. MacArthur est éditeur de Harper's Magazine. Sa chronique revient le premier lundi de chaque mois.
Dernières nouvelles :

Obama a cédé aux privilégiés...

Pour l'heure, cet accord ne prévoit aucune hausse des revenus, qui était pourtant souhaitée par le président et surtout par l'aile gauche de son parti. En revanche, les républicains ont obtenu d'importantes baisses des dépenses sans céder sur une hausse des impôts des ménages les plus riches ou la suppression de niches fiscales, comme celle qui profite aux propriétaires d'avions d'affaires, et qui a été dénoncée à de nombreuses reprises par le président lui-même. (...)
Le Devoir, 1er août 2011.

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D'autre part, il est intéressant de lire et entendre le Pr Bernard Lugan,
spécialiste de l'Afrique et de son histoire :

Il décrit une foule de réalités sur l'Afrique que la bête « rectitude politique » et la dictature des médias interdisent...

On se rend compte que c'est un ami des peuples d'Afrique mais qu'il ne verse pas dans la complaisance en décrivant les choses comme elles sont. On ne peut certes pas le classer dans  la « gauche caviar » à la BHL, mais il connait indiscutablement son domaine...

Il n'est certainement pas un partisan du « multiculturalisme » culpabilisant... Il est plutôt pour la coexistence pacifique, la coopération et le respect des différences entre les peuples.

Une bonne introduction est cette entrevue : 

Bernard Lugan interviewé par Novopress

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« La vérité est si obscurcie en ces temps et le mensonge si établi,
qu'à moins d'aimer la vérité, on ne saurait la reconnaître.»

Blaise PASCAL


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